Mobilier

S ‘ils représentent une dépense bien moins importante que celle consacrée à l’architecture, les travaux objets mobiliers n’en constituent pas moins une mise en valeur de l’esprit baroque de l’édifice. Ils sont également une marque caractéristique de l’évolution de la notion de conservation-restauration des œuvres d’art, protégées au titre des Monuments historiques. Sans oublier bien sûr que ce sont des objets de culte, répondant à une liturgie que l’on se doit de prendre en compte.

Comme pour l’architecture, les premiers travaux après guerre mondiale ont surtout été guidés par des problèmes de rénovation et de conservation immédiate. Parmi les premières interventions importantes a été menée en 1963 la restauration des tableaux des autels par le peintre Arthur Graff, de Sélestat. Ce dernier, sans se soucier de l’état originel des œuvres, s’est permis de nombreux repeints, parfois disgracieux.

A partir de 1972, les travaux de restauration firent l’objet d’un calendrier pluriannuel de la part de l’Association, en liaison avec la commune et la DRAC. C’est ainsi que furent programmées, année après année, en fonction des disponibilités financières, des interventions sur l’ensemble du mobilier. Les premiers travaux touchèrent les bancs anciens ainsi que des tableaux.

La restauration de l’orgue menée en 1997-1998 a mobilisé de nombreuses énergies. Accompagnée par Bernard Chalté, titulaire de l’instrument depuis 1966, conduite par le technicien conseil pour les Monuments historiques Marc Schaefer en collaboration avec le grand organiste Michel Chapuis, cette restauration exemplaire à plus d’un titre a été menée par trois maîtres de la facture d’orgue alsacienne, associés pour l’occasion : Gaston Kern, Yves Koenig et Richard Dott. A eux s’était joint un comité de pilotage chargé du suivi et de la validation des travaux. Et chacun reconnaît la grande qualité des travaux qui ont été effectués, redonnant à l’instrument d’André Silbermann toutes les sonorités inhérentes à la qualité du travail du grand facteur d’orgues du XVIIIe siècle. A côté de l’aspect instrumental, on peut également se réjouir de la restauration du majestueux buffet qui se développe sous la voûte de la première travée de nef où est peinte sainte Cécile, la patronne des musiciens.

N.B. On peut consulter la totalité des travaux sur le site de l’Association (collection Patrimoine restauré).

Dégradation de la dorure due à l'humidité sur une volute des confessionnaux. Photo G . Poinsot

Dégradation de la dorure due à l’humidité sur une volute des confessionnaux. Photo G . Poinsot

Traitement insecticide par anoxie : dans une bulle hermétique, l'air est remplacé par de l'azote pendant 4 semaines. Photo G. Poinsot.

Traitement insecticide par anoxie : dans une bulle hermétique, l’air est remplacé par de l’azote pendant 4 semaines. Photo G. Poinsot.

A partir de 2000, un vrai programme pluriannuel fut mis sur pied pour ce qui concerne l’ensemble du mobilier, notamment les autels-retables, toujours initié par l’Association. En 2001 fut commandée une étude préalable à leur restauration. Des sondages réalisés en plusieurs endroits permirent des découvertes importantes, qui ont conduit à un cahier des charges très précis. Sous plusieurs couches de repeints de couleurs blanc-gris sont apparues les teintes et décors d’origine : le bleu cyan légèrement veiné d’or des colonnes des autels latéraux, les petites feuilles dorées décorant certaines bases.

Les travaux de menuiserie, toutes les pièces de mobilier ayant été entièrement démontées et traitées en atelier, ont permis de constater la grande qualité des bois de chêne utilisés en structure et décor provenant des forêts de l’abbaye. Les colonnes creuses sont constituées de planches cintrées assemblées verticalement. L’ensemble du mobilier est en bon état de conservation,malgré quelques dégradations dues notamment aux remontées capillaires. L’humidité des sols a entre autre altéré la base des confessionnaux. Lors de la restauration, une ventilation a été assurée en posant de petites cales et en décollant légèrement les meubles des murs.Certaines pièces en tilleul (chapiteaux, bases, devants d’autels) ont souffert d’attaques d’insectes xylophages. On a même trouvé un planche de chêne (prise dans l’aubier) attaquée. Toutes les pièces de bois ont été traitées par anoxie curative. L’excès de sécheresse nuit également à la conservation. C’est ainsi que toutes les statues en tilleul de la fin du XIXe siècle qui garnissent les dossiers des stalles ont dû être imprégnées de résine, le bois devenu trop sec risquant de devenir cassant. Un même constat a été effectué pour la chaire.

L e démontage systématique des pièces en vue de leur restauration a permis d’effectuer certaines constatations architecturales. Les tombeaux des autels sont constitués d’une maçonnerie de brique recouverte d’une dalle de grès, souvent en réemploi. Une des niches à reliques, toutes vides, a servi à déposer un document relatif à la restauration de 2001, accompagné de quelques francs (au moment du passage à l’euro). A l’arrière des retables, les murs de briques restées apparentes démontrent que les autels ont été mis en place avant la mise en peinture des murs. Derrière le petit autel sud du transept a été découvert un curieux cadre en bois sur lequel est peinte une tête de Christ. Lors du démontage des grands autels du transept et des stalles ont été observées les anciennes colonnettes d’angles qui servaient de supports aux voûtes du XVIIe siècle. Lors du remontage, la stabilité des meubles a pu être rétablie.

L a chronologie des autels a été confirmée. Les devants d’autels sculptés, peints et dorés, sont bien de la fin du XVIIe siècle (ils portent les armes parlantes de l’abbé Roethelin, un rouge-gorge) et ont été réemployés dans les nouveaux autels terminés en 1730. De nombreuses pièces anciennes ont été réutilisées dans la chaire (dont des panneaux de marqueterie). Deux petits tableaux d’un Chemin de Croix ont été restaurés. On a pu découvrir au revers de l’un d’eux la signature du peintre Magès, auteur également des peintures murales des voûtes du choeur, de la croisée du transept et de la première travée de nef (sainte Cécile). Les talles de la fin du XVIIe siècle ont été remises en place lors du rehaussement du choeur à partir de 1730 ; quant aux statues ornant les dorsaux, elles sont toutes de la fin du XIXe siècle.

O n a pu se rendre compte, au fur et à mesure du décapage des différents repeints, que certaines parties du mobilier n’ont jamais été peintes et que seule la couche préparatoire à base de craie et de colle de peau avait été mise en place (grands autels du transept). Cette couche préparatoire, bien lissée, sert d’ailleurs de support à toutes les couches de peinture et de dorure. Quant à la peinture du mobilier, elle avait été effectuée sur place.
On a constaté que que les œuvres étaient plus altérées du côté sud, plus exposé à la lumière et au soleil, que du côté nord. Cela a parfois exigé un renouvellement complet des couches support qui avaient perdu toute adhérence.

T outes les restaurations ont été réalisées dans le respect des œuvres et des techniques. Restaurer un œuvre, c’est retourner à un état le plus proche possible de celui d’origine. Le tableau de saint Gilles de l’autel latéral sud de la nef est représentatif à cet égard. La restauration réalisée par le peintre Graf en 1963 s’est révélée très interventionniste, avec de nombreux repeints de mauvaise qualité, et des vernis épais, devenus opaque, empêchant la compréhension de l’oeuvre. La restauration a permis de retrouver la position d’origine de la patte de la biche, de restituer le décor forestier et d’éclairer l’iconographie, comme la présence du chasseur et de son chien. La compréhension et la lisibilité de l’oeuvre s’en sont ainsi trouvé considérablement améliorées.

C ertains repeints, de qualité, peuvent cependant être conservés, même si la couche d’origine est encore présente en dessous. Cela a été le cas pour les statues du XVIIIe siècle des petits autels de la nef qui ont conservé leur polychromie du XIXe siècle. Des technique innovantes peuvent également être mises en place. Curieusement, le revers de tous les tableaux des autels sont protégés par des planches verticales clouées au cadre. Elles ont été restaurées et remises en place, sauf pour les petits autels de la nef, car trop altérées. Des plaques d’aluminium, cintrées, comme les retables, les ont remplacées et un suivi attentif depuis leur mise en place en 2002 montre que rien n’a bougé. Dans d’autres cas, le doublage ancien de la toile a été supprimé, remplacé par une autre toile de doublage, plus légére ou par de simples bandes de tension.La difficulté d’interprétation archéologique rend parfois difficile le choix de restauration. C’est ainsi que les devants d’autels peints (sur les deux faces) des petits autels du transept présentent plusieurs couches picturales juxtaposées qui ont été laissées en place. Il a aussi fallu aussi convaincre les membres du Conseil de Fabrique de ne plus mettre de fleurs sur les autels, leur arrosage répété et abusif risquant de détériorer le bois, la peinture et la dorure (ce qui s’est notamment produit pour le petit autel face au peuple, qui a dû être restauré).

Discussion autour d'une porte de confessionnal restaurée. Photo G. Poinsot

Discussion autour d’une porte de confessionnal restaurée. Photo G. Poinsot

L ‘ensemble de ces travaux ont été effectués sous la maîtrise d’oeuvre du conservateur des Monuments historiques (Gilbert Poinsot). Quasiment une fois par mois, une réunion de chantier à laquelle participaient l’Association, la mairie et la Fabrique de l’église, permettait de faire le point sur l’avancement des travaux et de prendre des décisions sur leur poursuite. Les discussions furent parfois animées : fallait-il conserver une dorure ancienne, même défraîchie ou altérée, ou la remplacer par des feuilles neuves, rehaussant l’éclat de l’oeuvre ? Et ce repeint intempestif, pourquoi ne pas l’éliminer ? Et comment combler une lacunes ? Ce vernis sur les stalles n’est-il pas trop foncé ? Tout au long des travaux, ces questions ont reçu des réponses grâce à la compétence et à la pédagogie dont ont su faire preuve les entreprises. Un petit regret toutefois : celui de la restauration du grand autel nord du transept, dont la dorure aurait mérité des soins plus attentifs.

T oujours présente lors de la restauration des objets protégés au titre des monuments historiques faisant l’objet d’une intervention programmée, l’Association s’est attachée, parfois avec la Fabrique ou des dons, à faire restaurer des objets de plus petite taille, comme des statuettes ou des tableaux.

A u total, le bilan des travaux sur le mobilier s’avère positif puisque tous ont fait l’objet d’une restauration. Tous, non, comme dirait un grand illustrateur. Car un seul n’a pas été concerné, le plus grand sans doute, le maître-autel. Bien qu’ayant fait l’objet de travaux et de retouches (tous les faux-marbres ont été remis au jour dans les années 1970-1980) , il mériterait une révision complète et un démontage, notamment après les dégâts occasionnés par les mouvements de la tour orientale. Espérons que cette opération pourra aboutir prochainement afin de redonner toute son homogénéité à cet ensemble baroque de grande qualité auquel sont particulièrement attachés les habitants d’Ebersmunster.

Année

Mobilier

Coût total TTC

Participation Etat

Participation CG 67

Participation commune

+assoc

Entreprise

1982

Chaire à prêcher

20 244 F

40,00%

25,00%

35,00%

Hinterlang

10 bancs anciens

94 244 F

40,00%

25,00%

35,00%

Hinterlang

1983

5 bancs anciens

59 999 F

40,00%

25,00%

35,00%

Hinterlang

1984

10 bancs anciens

126 000 F

40,00%

25,00%

35,00%

Hinterlang

1985

Tableau maître-autel Adoration Bergers

59 999 F

40,00%

25,00%

35,00%

ARCOA

Balustrade : essai

8 500 F

100% assoc

Brücker

1986

Balustrade : restauration

63 020 F

100% assoc

Brücker

1987

Tableau : ND Scapulaire

68 500 F

40,00%

25,00%

35,00%

ARCOA

1988

Tableaux : Jésus et Docteurs+Annonciation

68 000 F

40,00%

25,00%

35,00%

ARCOA

1989-1990

Tableau (3) St Maurice

82 320 F

40,00%

25,00%

35,00%

ARCOA

Statue Ste Anne

étudiante

ARCOA

1997-1998

Orgue restauration

1 600 000 F

40% sur HT

25,00%

35,00%

G. Kern, Y. Koenig, R. Dott

1998-2000

Orgue entretien

10,00%

90,00%

1999-2000

Tableau Vierge à l’Enfant Scapulaire

84 000 F =

12 805 €

40% sur HT

25,00%

35,00%

Claude Bernhart

J J Meyer

Tableau ex voto Scapulaire

100% assoc

C. Bernhart

2001- 2003

Mobilier étude préalable sondages

125 000 F

40,00% sur TTC

60,00%

Eschlimann

2001-2002

2 autels latéraux nef restauration

489 164 F

(total) =76681€

40,00%

25,00 €

35,00%

J.J. Meyer, C. Bernhart

Dont 4 tableaux

122 000 F (18600 €)

40,00%

25,00%

35,00%

I. Chardel

2002

Statue Vierge à l’Enfant

100% assoc

J.J. Meyer

2003

Sacristie mobilier neuf

14 440,00 €

100% assoc

2003-2004

Statues Vierge à l’Enfant et Vierge de Pitié

2 800 €

1 7000€

100% assoc

J.J. Meyer

2004-2005

Autel N transept

49 382,84 €

40 % sur HT

25,00%

35,00%

J.J. Meyer, tableau E. Meyer

2005

Fonts baptismaux, tête st Jean,2croix de procession, pélican

5 500,00 €

100 % assoc.

J.J Meyer

2005-2006

Stalles choeur

47 476,79 €

40% sur HT

25,00%

35% assoc.

Le Chevalet, P. Meyer anoxie

Banc de com-munion, ambon

3 500,00 €

100% assoc

Le Chevalet

2007

Orgue local soufflerie

2 787,22 €

40% sur HT

25,00%

35,00%

2007-2008

Chaire

100% assoc+sponsor

Erny

2007-2009

Grand autel nord de la nef

77 504,80 €

40 % sur HT

25,00%

35,00%

Eschlimann,menuiserie Brenner, tableau N.Jeannette,tissu J. Gauvin

2009

Calvaire extérieur

5 300,00 €

100% assoc

Augusto

2010

Grand autel sud nef

100 000,00 €

40 % sur HT

25,00%

35,00%

P. Meyer

Tableau E. Meyer

2011

Autel S transept

52 200,00 €

40% sur HT

25,00%

35,00%

P. Meyer

2 tableaux Chemin de croix

6 050,00 €

100% assoc

P. Meyer

2012

Statues 2 anges

4 600,00 €

100% assoc

P. Meyer

2012-2013

Confessionnaux+ 2 portes

118 116,96 €

40% sur HT

25,00%

35,00%

P. Meyer

Orgue traitement

5 620,00 €

40% sur HT

25,00%

35,00%

P. Meyer

2 portes

4 018,56 €

100% Fabrique

Le Chevalet

2013

Tableaux Adoration Berges

Annonciation

Jésus et Docteurs

40,00%

25,00%

35,00%

P. Meyer