L’église
La façade ouest de l’église abbatiale est en totalité l’œuvre de l’architecte Peter Thumb, originaire du Vorarlberg (Autriche). Elle est le résultat de deux campagnes de travaux distinctes. Les deux tours furent érigées en 1709-1710. Le couverture en bulbe, forme peu usitée en Alsace, domine la plaine de l’Ill. Lors de la reconstruction de la nef en 1725, l’architecte éleva un nouveau mur entre les deux tours, ménageant ainsi un porche vouté d’arrêtes au rez-de-chaussée et une tribune pour orgue à l’étage. La niche en pignon abrite une statue de saint Maurice, patron de l’église, et une statue de la Vierge se dresse en son sommet.
L’église abbatiale d’Ebersmunster est considérée comme le meilleur exemple de l’art baroque en Alsace, issu de l’esprit de la Contre-réforme.
Elle adopte un plan qui se rapproche de celui des églises baroques du Vorarlberg, tout en évitant certains excès des artistes de cette région ? L’architecte Peter Thumb – auteur, quelques années plus tard, de 1755 à 1761, de Saint Gall, en Suisse –
y a privilégié un espace dégagé, lumineux, où le regard est comme attiré naturellement vers le chœur et le maître-autel.
L’effet d’allégement des volumes est accentué par le décor de stucs et les peintures monumentales.
Pour les décors stuqués, Jakob Machoff s’est inspiré, en 1727, de l’art de l’ornementation français, adopté par les artistes de la vallée du Rhin vers 1700. Quant aux peintures, elles sont l’œuvre des peintres Joseph Malter, JF Siber (ou Siffert) et Joseph Mages, originaire du Tyrol.
La musique, qui participe également du mouvement baroque, est présente par la figure peinte de sainte Cécile, œuvre attribuée au Strasbourgeois Siber (ou Siffert) et qui a échappé aux restaurations parfois abusives du XIXème siècle qui ont touché le décors peint de la nef (restauration par Eugène Laville, de 1864 à 867).
Décorant la voûte au-dessus de la tribune d’orgue, la peinture monumentale représente sainte Cécile jouant d’un orgue à deux claviers, entourée d’anges musiciens virevoltant dans les nuées. Ce décor, que l’on doit au peintre strasbourgeois Syber (ou Siffert) en 1727, a conservé toute sa fraicheur car il a échappé à la compagne de restauration (parfois abusive) menée par Eugène Laville de 1864 à 1867, et qui toucha les peintures de la nef.
Comme pour l’architecture, le mobilier fut mis en place en deux fois. De la période de la fin du XVIIème – début XVIIIème siècles datent les stalles du chœur (les dorsaux sont de la fin du XIXème siècle), une grande partie de la chaire à prêcher (dont la statue de Samson), ainsi que quatre devants d’autels dont nous avons signalé qu’ils portent les armes de l’abbé Rothelin, décédé en 1715. A cet ensemble est attaché le nom des frères Winterhalter, auteurs du remarquable retable de la chapelle Saint-Sébastien de Dambach la Ville. Le maître-autel, auquel travailla le sculpteur Ignatius Meyer de Sélestat, marque en 1727 le début de la construction de la seconde période (construction de la nouvelle nef). Les autels latéraux sont datés de 1730, et les autels de la nef sont attribués au sculpteur Anton Ketterer I (1692-1748), originaire de la Forêt Noire, et établi par la suite à Sélestat. Quant à l’orgue, une des dernières œuvres du grand facteur d’orgues André Silbermann, il fut mis en place en 1730-1731.
Contrastant avec la sobriété de l’extérieur, l’intérieur de l’édifice a reçu un décor baroque.
L’apport de lumière y a été privilégié (deux fenêtres superposées par travée), mettant en valeur le décor monumental de stucs dus à Jacob Machoff et de peintures murales, œuvres de Joseph Matter (ou Mattle), mis en place à partir de 1727.
Quant au mobilier : autels-retables, chaire à prêcher, confessionnaux, il contribue à l’harmonie baroque.
Terminé en 1730, il réutilise certains éléments de la fin du XVIIème et du début du XVVIIIème siècles.